Jour 9 - Aménagement raisonnable et charge disproportionnée

Comprendre ces deux notions pour mieux appréhender le RGAA.

Ce que j’ai fait :

Ce que j’ai appris

Aménagement raisonnable

La Convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies(lien externe) interdit toutes les discriminations fondées sur le handicap. Selon l’article 2 de la CIDPH :

La discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable.

Refuser l’aménagement raisonnable constitue donc une forme de discrimination. Toujours dans son article 2, la CIDPH définit “l’aménagement raisonnable” comme :

les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentale.

L’obligation d’aménagement raisonnable vise donc à mettre en oeuvre les aménagements nécessaires pour permettre à une personne en situation de handicap d’être à égalité avec une autre, afin de compenser l’inégalité induite par le handicap.

La charge disproportionnée

La notion de “charge disproportionnée” est essentielle pour définir les limites de l’obligation d’aménagement raisonnable. La directive européenne de septembre 2016 sur l’accessibilité(lien externe) donne la définition suivante :

Par «mesures qui imposeraient une charge disproportionnée», il convient d’entendre des mesures qui imposeraient une charge organisationnelle ou financière excessive à un organisme du secteur public ou qui compromettraient la capacité de celui-ci de réaliser son objectif ou de publier les informations nécessaires ou appropriées aux tâches qu’il doit remplir et aux services qu’il doit fournir, tout en tenant compte des bénéfices probables ou des inconvénients susceptibles d’en résulter pour les citoyens, en particulier pour les personnes handicapées.

La charge disproportionnée s’apprécie donc en tenant compte des coûts financiers et autres (ex : impact sur l’organisation de travail) que ces mesures génèrent pour l’organisation ou l’entreprise au regard de sa taille et de ses ressources propres. La directive européenne précise également que :

L’absence de priorité ou le manque de temps ou de connaissances ne devraient pas constituer des raisons légitimes.

La directive ajoute également que c’est aux Etats membres de fixer les information supplémentaires permettant l’application ou non d’une charge disproportionnée. Ces informations sont essentielles car ne pas bien cadrer la notion de charge disproportionnée, c’est ouvrir la porte à toutes les exemptions à l’accessibilité. En France, c’est donc le décret du 24 juillet 2019 qui précise son application.

Les problèmes soulevés par la définition actuelle du décret français

Le décret estime que la mise en accessibilité entraîne une charge disproportionnée lorsque :

1) La taille, les ressources et la nature de l’organisme concerné ne lui permettent pas de l’assurer ; 2) L’estimation des avantages attendus pour les personnes handicapées de la mise en accessibilité est trop faible au regard de l’estimation des coûts pour l’organisme concerné, compte tenu de la fréquence et de la durée d’utilisation du service, ainsi que de l’importance du service rendu.

1) les notions de “taille” et de “nature” restent très floues, aucun seuil d’exemption n’est fixé ce qui rend l’interprétation de charge disproportionnée très peu contraignante.

2) les organismes concernés pourraient mettre en avant le fait que les personnes en situation de handicap utilisent peu leurs services (on a tous déjà entendu la fameuse phrase “Notre public cible ce ne sont pas les personnes handicapées !”). D’autre part la fréquence et la durée d’utilisation ne sont pas pertinentes, il est par exemple crucial pour certaines démarches administratives de demander un extrait d’acte de naissance en ligne sans pour autant que ce soit un acte fréquent ou long à faire.

Le décret précise également :

Les contenus ou fonctionnalités qui ne sont pas rendus accessibles compte tenu du caractère disproportionné de la charge correspondante sont accompagnés, dans la mesure où cela est raisonnablement possible, d’une alternative accessible.

Dans le cas où, en raison d’une charge disproportionnée, des contenus ne seraient pas rendus accessibles, l’organisme est donc tenu de fournir une alternative uniquement “dans la mesure où cela est raisonnablement possible”. Il s’agit encore une fois d’une notion très floue, laissant le champ libre à l’interprétation.

Enfin, contrairement à la directive européenne, le décret ne fait nullement référence à la notion “d’aménagement raisonnable” qui, nous l’avons vu, met en avant le besoin de fournir les moyens d’une égalité réelle d’accès aux droits et libertés fondamentales pour les personnes handicapées. Le décret ne retient que l’aspect “charge disproportionnée” et met donc de côté l’objectif d’égalité d’accès.